LE DIEU DE LA COKE Acrylique sur toile 140 x 100 cm Quadriptyque

Commentaire de Bernard ANGER

Pour qui connait les peintures précédentes, le sujet est dans la continuité : le corps humain. Le mode de représentation ne surprend pas non plus ce qui montre que l’esthétisme pictural, fidèle à l’artiste, répond à sa volonté et n’est pas dû au hasard. Tout en maitrisant progressivement la technique du médium acrylique, sa palette des couleurs, moins agressive qu’aux débuts, se personnalise et s’affine à fleur de peau (de peinture).

Le thème est le corps, du moins ce qu’il en reste. Mais l’épuration des organes n’est pas un hasard; elle flirte avec le minimalisme à la Basquiat, juste quelques éléments graphiques transcrits en signes évocateurs, puissamment suggérés. Le mort est bien vivant.

Contrairement au peintre Egon Schiele (1890-1918 mort à 28 ans), Morgan ne représente pas son propre corps, ne donne pas dans l’autoportrait comme je l’ai pratiqué. Sa maîtrise de l’expressivité symbolique du corps n’exige pas non plus l’utilisation d’un modèle humain.

Le premier contact visuel de la toile provoque la surprise, la gêne presque physique. Même si l’on ne comprend pas tout de suite, on reste collé à brouter la surface du regard. Le corps plaqué, là devant nous, est saisi dans sa totalité par des lignes et contours coulants et doux, il est bien présent, solide dans sa fragilité, il s’impose, n’a rien de fugace. L’ensemble graphique est bien plaqué sur la surface de la toile et à part les superpositions de couches de peinture créant un mille-feuille de matière, n’a pas de profondeur, de fausse perspective.

Le trait de peinture contraste avec les aplats sous jacents. Il produit une apparence de fragilité, voire de crispation; la ligne est parfois brisée, souvent courbe à la limite de la coulure. Le personnage est fort, bien charpenté par ces lignes qui constituent son squelette. Comme souvent, l’image a une représentation centrée construite de voutes, cercles ramenant l’œil au centre, affirmé ici comme une cible par la jonction des toiles accolées en croix sur le cœur rouge.

La représentation est quasi radiographique, on voit Dans et Sur, vision analogue au vitrail dont les fragments de verre transparents sont tenus par le squelette de plomb

Cette toile contemporaine est intemporelle: je suis à mes 10 ans dans la procession nocturne de Bourbriac noyé de bannières, lucioles, statues naviguant sur les chants bretons, expression de la vie côtoyant la mort. Sans oublier mes jeux dans les ossuaires jonchés de crânes et de fémurs.

Cette toile est-elle un homme-une femme, un mort-vivant, un blanc noir jaune ou rouge?

Son Moi transparait sur la toile

Être artiste c’est exprimer sa vision en canalisant son dédoublement, sa déchirure, son hypersensibilité.

Pépé, le 13 octobre 2020

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